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Les anneaux de Saturne : le réseau, l’archive, l’auteur archéologue

Giulia Ferretti, 3e cycle, Université de Montréal

Résumé : Le narrateur des Anneaux de Saturne (W. G. Sebald) raconte un long voyage à pied dans le Suffolk anglais, au terme duquel il tombe dans un grave état de paralysie. Les thèmes de l’infirmité et du mouvement, de la perte et du souvenir alternent dès les premières pages du livre. L’article s’interroge sur cette alternance de thèmes opposés et sur le rôle que joue l’accumulation d’images et d’épisodes fragmentaires dans cet entrelacement. La figure du réseau, première image du roman, est considérée comme emblématique à cet égard. À l’instar des autres photographies du livre, l’image du réseau apparaît tantôt comme un quinconce, un lien structurel et empathique entre les personnages, tantôt comme une grille, une critique de tout regard indifférent sur les personnes et les choses en marge. La photographie en tant que dispositif de vision objective et univoque est ainsi profondément remise en question.

Revue Fémur
2563-6812
Revue Fémur

Dans un style épisodique, stratifié, érudit et clairement mélancolique, Les Anneaux de Saturne1 explorent les thèmes de l’immobilité, de la marginalisation sociale et de la destruction. Le roman est l’histoire à la première personne d’un homme dans une chambre d’hôpital, infirme, aux sens émoussés, et complètement isolé du reste du monde. Pourtant, dans son immobilité, quelque chose déclenche chez le narrateur le besoin d’écrire et de revivre son voyage récemment achevé. Bien que cela semble contre-intuitif, ce déclencheur est précisément lié à l’état d’infirmité du protagoniste, à son rejet ou à son incapacité à s’inscrire dans le reste du monde social2. Commence ici un long flashback qui raconte les précédentes errances solitaires du narrateur dans le Suffolk anglais. Il s’agit d’une sorte de pèlerinage caractérisé par la rencontre ponctuelle de personnes, de lieux, de photographies jaunies et d’objets oubliés, contraints à la même condition d’isolement que le protagoniste.

Ces rencontres sont indifféremment spatiales ou mémorielles. Fortuites ou planifiées, elles sont le résultat d’enchaînements d’événements et de pensées qui renouvellent chez le narrateur la mémoire de personnes, d’images ou de textes connus dans le passé. De la succession de ces rencontres émerge une cartographie spatio-temporelle de lieux, de personnes et de choses en marge du monde social. Si le protagoniste est incapable de se mouvoir dans la banalité du quotidien, il est néanmoins orienté et se déplace dans cette accumulation d’objets, de lieux et de personnes qui lui correspondent.

Sa capacité à se souvenir et à guider le lecteur, dans l’analepse caractérisant le roman, est due à l’occurrence ou à la recherche de telles rencontres. Comme des vestiges archéologiques, les photographies qui peuplent le texte de Sebald sont les traces de ces rencontres. Dans leur hétérogénéité, les photographies rendent présents des objets spatialement et géographiquement éloignés. Quelles sont donc les causes de l’alternance des thèmes de l’immobilité et du pèlerinage, de l’état de perte et de la reconstruction de la mémoire dans le roman ? Comment l’enchevêtrement du texte et de l’image articule-t-il la cartographie de Sebald, faite d’oppositions si contrastantes ?

Nous tenterons d’approfondir les questions suivantes à partir de la figure du réseau, qui apparaît sous différentes formes tout au long de la narration3. En effet, il nous semble que le réseau a une double signification dans Les Anneaux de Saturne : parfois, son image est utilisée pour motiver et décrire la succession de rencontres qui caractérise le roman4 ; à d’autres moments, le narrateur décrit le même réseau comme une grille de lecture du réel, un modèle rationalisant, le regard « cartésien » de la modernité sur le monde5. Si, dans le second cas, le réseau émerge en tant que média d’une pensée critique sur la modernité, dans le premier cas, la figure du réseau met en évidence une série de références souterraines et allégoriques que le regard cartésien ne peut pas saisir. Constamment redéfini par l’accumulation de texte et d’images qui le représentent, le réseau nous semble être l’objet exemplaire des Anneaux de Saturne, capable d’incarner le sens des oppositions binaires énumérées ci-dessus. Dans les paragraphes suivants, nous montrerons donc cette double signification que le réseau assume dans l’œuvre analysée.

Quinconce

La cartographie décrite par le pèlerinage du protagoniste trace un réseau de « sens cachés », pour reprendre l’expression de Bianca Theisen6. Il s’agit donc d’une structure invisible qui unit les personnes, les objets et les lieux immortalisés dans le roman.

Dans les premières pages des Anneaux de Saturne, le narrateur introduit cette structure commune par l’image du quinconce. C’est un entrelacement régulier de lignes que l’érudit et polymathe anglais Thomas Browne (1605-1682), dans son ouvrage ésotérique et philosophique Le Jardin de Cyrus, attribue à la configuration intime du monde7. En se concentrant à nouveau sur la figure de Browne, la fin du roman renvoie au début, perpétuant la structure réticulaire du texte et soulignant la pertinence de la pensée brownienne dans l’ensemble du livre. Dans le dernier chapitre, Sebald se réfère à la bibliothèque imaginaire décrite dans le Musaeum Clausum. Le « catalogue de livres remarquables, tableaux, antiquités et autres objets singuliers », décrit par Browne et repris par Sebald, est une accumulation d’objets réels ou imaginaires de nature très diverse, entreposés dans des lieux éloignés les uns des autres8. Ces objets existent en tant que collection personnelle de Browne du fait qu’ils sont répertoriés l’un après l’autre dans le Musaeum Clausum. Le texte représente la collection en rassemblant dans un contexte narratif et matériel unifié les objets, également sélectionnés pour leur singularité. De même, l’accumulation de correspondances au centre des Anneaux de Saturne actualise la collection du narrateur, composée d’objets spatialement et temporellement éloignés, en l’inscrivant dans le même livre et le même récit. Les objets, aussi différents soient-ils, sont ainsi comparables, constitués d’une même structure physique, présentée sous forme d’images et de mots. Dans le roman sebaldien, les images et les mots se succèdent sans rupture de continuité.

Comme dans le cas du Musaeum Clausum, le narrateur des Anneaux de Saturne s’intéresse à de tels objets en raison de leur singularité, c’est-à-dire de leur caractère hors norme. Se référant aux similitudes qui caractérisent les vies de Friedrich Hölderlin et de Michael Hamburger, il parle par exemple de « correspondances » et d’« affinités électives9 » pour décrire l’intimité sélective et affective qui le lie à ces personnes. Comme dans le cas du réseau brownien, le roman de Sebald n’oppose pas la sélection attentive des objets à l’accumulation de la collection. Chaque élément représenté révèle une trame commune, parce qu’il présente des personnes qui ne se reconnaissent pas dans l’ordre social dominant, à l’instar du protagoniste. Par exemple, les photos des pages des Cahiers noirs de Roger Casement, qui répertorie ses liaisons homosexuelles10, sont aussi significatives que la photo du portrait du poète Algernon Charles Swinburne, contraint à la réclusion par ses fréquentes crises de panique11. Les deux photographies interrompent le récit biographique de deux personnages vaincus et emprisonnés : Casement a été condamné pour haute trahison après avoir collaboré avec les mouvements indépendantistes irlandais du début du XXe siècle12, tandis que Swimburne a été contraint à l’emprisonnement en raison de sa santé physique et mentale fragile13. Dans les deux cas, les photographies sont les témoins oubliés, mais survivants dans le présent, des vies cachées des deux personnages.

Comme le Musaeum Clausum, la collection sebaldienne est ouverte et non triée. Il s’agit d’une série d’images, de photos, de documents et de reproductions de tableaux, qui se réfèrent les uns aux autres de manière analogique, sans être ordonnés ou conclus. Le seul point commun de cet ensemble d’anomalies est l’inscription de ces éléments dans la matérialité du livre. Le livre Les Anneaux de Saturne les met en relation puisqu’il les place dans le même contexte matériel, les adapte à la page et les rend en noir et blanc. Il est certain que le choix du noir et blanc est également lié aux coûts éditoriaux, mais Sebald lui-même explique dans un entretien que « the black-and-white photograph, or rather the gray zones in the black-and-white, stand for [the] territory that is located between death and life14 ». La nature intermédiale du livre et le format dans lequel les images y sont insérées sont des acteurs centraux dans la structuration de la cartographie du monde des marges décrite dans l’œuvre de Sebald.

Pour voir de plus près comment cette cartographie est délimitée, lisons l’extrait décrivant la prose brownienne, contenu dans les premières pages des Anneaux de Saturne. Ici, Sebald décrit comment la vision d’en haut accorde aux lecteurs de Browne une vision si nette qu’elle devient microscopique. Le particulier et l’universel ne s’opposent pas mais se renvoient l’un à l’autre. Ils deviennent plus nets lorsqu’ils sont mis en relation.

[…] il ne parvient pas toujours à décoller du sol, mais quand il se laisse porter, tel un adepte du vol à voile aspiré par les courants d’air chaud, de plus en plus haut, avec son fardeau, par les mouvements orbiculaires de sa prose, alors, même le lecteur d’aujourd’hui a le sentiment d’entrer en lévitation. La vue devient plus claire à mesure que l’éloignement augmente. Les plus petits détails vous apparaissent avec une étonnante précision. C’est comme si on avait l’œil à la fois collé à une longue vue retournée et à un microscope. Et cependant, dit Browne, chaque connaissance est environnée d’une obscurité impénétrable15.

Peu après ces lignes, Sebald écrit que la structure universelle du quinconce est garante de ce lien intime entre le microscopique et le macroscopique. Dans ce contexte, l’image de la couverture de la première édition du Jardin de Cyrus représentant la structure du quinconce, apparaît dans le texte, accompagnée d’une inscription tirée de l’Institutio Oratoria de Quintilien16 : « Quid quincunce speciosius, qui, in quamcumque partem spectaveris, rectus est ? » (traduit : Qu’y a-t-il de plus beau que le quinconce, qui, de quelque côté qu’on le regarde, présente des lignes droites ?) Le quinconce est un agencement de cinq éléments, dont quatre se trouvent sur les côtés d’un rectangle imaginaire et un au centre. Si, comme le note Bianca Theisen, d’autres traités avaient déjà observé la récurrence d’un tel ordre dans l’histoire de l’agriculture, Browne découvre une telle structure dans les objets les plus divers, des œuvres architecturales aux éléments naturels, établissant une correspondance entre des objets individuels, la forme du nombre latin cinq et l’ordre général de l’univers. Le réseau du quinconce incarne une cosmologie. Il s’agit d’une représentation, d’un filtre entre l’observateur et le monde extérieur. Un filtre qui pourtant ne mesure pas la réalité, mais met en évidence ses points de connexion.

Cette structure, Browne la découvre partout, dans la matière vivante ou morte, dans certaines formes cristallines, chez les étoiles de mer et les oursins, sur la peau de plusieurs espèces de serpents, dans les traces entrecroisées des quadrupèdes, dans la configuration du corps des chenilles, papillons, vers à soie, phalènes, dans la racine de fougères d’eau, les enveloppes des graines de tournesol et de pins parasols, au cœur des jeunes pousses de chêne, dans les tiges de prêle et dans les œuvres d’art des hommes, dans les pyramides d’Égypte et dans le mausolée d’Auguste, mais aussi dans le jardin du roi Salomon, dans l’ordonnance des lys blancs et des grenadiers qui y sont alignés au cordeau17.

Couverture de la première édition du Jardin de Cyrus, Thomas Browne

Analysons donc les manières dont les connexions soulignées par Sebald s’articulent dans le roman jusqu’à composer un réseau d’objets hétérogène mais cohérent. Les premiers personnages à s’imposer à la mémoire du narrateur sont Michael Parkinson et Janine Dakyns, deux universitaires liés par une profonde amitié18. Le souvenir des deux académiciens surgit spontanément : se décrivant en train d’ordonner les notes qui constitueront les Anneaux de Saturne, le narrateur pense au fait qu’à l’époque des événements racontés dans le livre, M. Parkison et Mme Dakyns étaient encore en vie. Les mots avec lesquels le narrateur décrit le bureau de Mme Dakyns, le contexte de ses études et les conversations sur l’œuvre de Gustave Flaubert sont particulièrement intéressants. Depuis des années, elle empile des feuilles et écrit compulsivement. Les feuilles empilées prennent la forme d’un paysage, qui change constamment au fil du temps. Les papiers sont l’image des « âges successifs du développement de l’univers de papier de Janine19 ». Ils montrent l’idée du temps qui anime le roman sebaldien, intimement liée au réseau de correspondances que représente le quinconce.

En effet, à la surprise du narrateur, l’érudite est capable de se repérer dans ses papiers et de trouver ce dont elle a besoin. Devant ses montagnes de documents, la romaniste avance d’un pas sûr, elle trouve le sens, la structure de la conformation géographique particulière qui couvre son sol. Elle reconnaît dans ces cartes la stratification du temps et s’y déplace habilement. Le fait que les objets recherchés soient submergés par le temps, et par d’autres cartes, n’empêche pas l’érudite de s’orienter.

Mme Dakyns s’oriente dans la stratification spatiale et temporelle de ses cartes parce qu’elles constituent le « paysage » dans lequel elle vit. De même, le narrateur des Anneaux de Saturne est capable d’imaginer une cartographie en traçant des relations entre des objets oubliés par le temps et invisibles pour la plupart. Il peut le faire parce que ces objets s’inscrivent dans son « paysage », c’est-à-dire dans le contexte spatio-temporel dans lequel il se trouve immergé20. Il « ne peut s’empêcher » de signaler les points communs21, c’est-à-dire les points de contact avec sa propre expérience, ou avec d’autres histoires et d’autres objets qui peuplent ce paysage. Il accède à la temporalité et à l’histoire en général à travers ces points de contact. Les photographies qui apparaissent de manière inattendue entre les lignes du texte peuvent être comprises à partir de ces associations soudaines et, selon l’expérience du narrateur, inévitables. Bien que provenant d’époques différentes, les images photographiques s’imposent à la mémoire et soulignent leur existence face au narrateur, qui ne peut s’empêcher d’en parler. La temporalité de Sebald est faite d’associations allégoriques, qui montrent la pertinence du passé par rapport au présent.

La visite du protagoniste chez Michael Hamburger est un autre exemple de son expérience où le récit se déplace fluidement dans l’espace, puis dans le temps, à partir des intersections mises en évidence par le réseau brownien. Les points communs entre la vie du narrateur et celle du poète sont évidents. Tous deux ont passé leur enfance en Allemagne et, éloignés de leur pays, se sont installés en Angleterre non loin de Manchester. C’est dans les environs de Manchester, vingt ans plus tard, qu’ils ont rencontré Stanley Kerry, critique littéraire et professeur d’université, et qu’ils ont écrit un récit biographique sur lui. Ils ont fini par se reconnaître dans la vie de Friedrich Hölderlin, notamment dans le sens qu’il donnait au voyage et à l’exil22. Les deux existences sont tellement similaires que, par moments, le narrateur se persuade qu’il a passé son enfance dans la même maison que Hamburger, y faisant « très exactement la même vie qu’il y menait lui-même23 ». De même, les vies du narrateur et du traducteur correspondent à celles de Hölderlin. Il a déjà été remarqué que la scène finale de la série de correspondances évoque le Jardin de Cyrus : en attendant un taxi dans le jardin d’Hamburger, où se trouve une pierre où est inscrite l’année de naissance d’Hölderlin, le narrateur s’attarde sur un scarabée aquatique, l’un des animaux cités par Browne pour expliquer la structure du quinconce24. C’est l’un des moments les plus évidents où le récit est guidé par les intrigues inattendues, résultats des correspondances qui affectent l’expérience du protagoniste.

La fenêtre représentée dans les premières pages du livre fait également partie de la succession des « affinités électives » qui composent le roman. Le narrateur ne voit pas l’extérieur, mais observe les lignes noires qui composent la fenêtre. La perception de la grille à la fenêtre de la chambre d’hôpital le ramène à des perceptions passées, à d’autres récits, images et expériences impliquant une grille, bien que sous des formes différentes. Le sentiment d’empathie qui anime le narrateur des Anneaux de Saturne consiste à associer la spatialité d’un objet, d’une situation ou d’un lieu, perçus dans le présent, à des lieux et des histoires d’un autre temps. Dès la première perception de la grille dans sa consistance et sa finitude, les éléments du monde sebaldien deviennent les médias de l’errance du protagoniste. À partir de la perception initiale, le réseau de connexions s’étend à la vie des habitants de ces lieux ou des utilisateurs de ces objets. Le quinconce continue à se déployer, jusqu’à atteindre, par exemple, les origines de la sériciculture en Chine, les origines du réseau ferroviaire au Congo et, selon les mots de Sebald, les « traces de la destruction » qui « remontaient jusqu’au plus lointain passé25 ». Il convient de rappeler que dans les premières pages du livre, le narrateur se trouve sur un lit d’hôpital. Ici, l’empathie sebaldienne qui rend possible le réseau de correspondances est aussi une souffrance commune en raison de la violence et de la destruction. Cette douleur est ainsi partagée entre le narrateur et les personnages et objets décrits dans le texte.

En opposition explicite à la valeur documentaire du récit historique, à l’organisation chronologique conventionnelle du temps et à la rhétorique qui associe le moment présent à un instant vide et fugace, la temporalité de Sebald est fragmentée, épisodique, mais a une grande influence sur le temps présent. Les personnages historiques et les souvenirs racontés par le narrateur sont en effet pertinents pour le présent, ils sont évoqués et vivifiés par ce dernier. Cette temporalité émerge dans la perception de lieux et d’objets spécifiques, dont les histoires s’entremêlent, sans jamais s’organiser en un récit cohérent. Il est clair que la présentification sebaldienne du passé n’est pas un désir de restauration ou de remonter dans le temps. En effet, le narrateur s’intéresse au présent et à la manière dont les traces d’expériences et de vies passées persistent dans le présent. Mais, ajoutons-nous, Les Anneaux de Saturne ne décrivent pas non plus la recherche d’une expérience exhaustive en particulier. Le long flashback du roman n’est pas en vue d’une fin déterminée. En d’autres termes, le narrateur n’entreprend pas une reconstruction unitaire et linéaire du passé, mais le compose et le décompose, le comprend et le revit de manière toujours nouvelle, en le mettant en relation avec des situations et des objets toujours différents. Comme la prose de Sebald, l’expérience du protagoniste reste fragmentée. La temporalité décrite par le narrateur des Anneaux de Saturne se rapproche d’une collection qui est produite et enrichie par son expérience26, qui, à son tour, établit un lien entre ses souvenirs et son vécu actuel.

Il s’agit d’une collection sans stratégie ni catalogue, et par conséquent jamais conclue. Un assemblage d’expériences et de fragments, sans logique ou épistème prédéfini27. Ces fragments se retrouvent dans le présent et médiatisent la prégnance du passé dans le présent. Ils sont géographiquement dispersés, inscrits dans le lieu dont ils racontent l’histoire. Ils sont liés entre eux pour former une collection à partir du réseau de perceptions et de déplacements géographiques tracés par le voyageur sebaldien. Un homme dont la biographie est presque écrite sur le modèle de la vie de l’auteur, mais aussi un personnage marginal, invisible au monde, sans visage ni nom. Comme la collection de photographies qu’il décrit, le narrateur est un homme anonyme. Cette absence de caractérisation du protagoniste garantit la portée critique des Anneaux de Saturne. En montrant l’existence d’un monde en marge et d’une temporalité non chronologique, le narrateur ne se fait pas le porte-parole de sa bataille ni des batailles racontées dans le livre. Sa critique ne renvoie pas à une situation particulière. À travers l’image du réseau, le narrateur critique la démarche de ceux qui ne remarquent pas les photographies jaunies et les bâtiments abandonnés qui constituent sa collection et sa façon de voir le monde. Il critique ainsi les sociétés modernes qui regardent la réalité au lieu de la voir, pour faire écho aux réflexions d’Isabelle Gadoin sur le sens des images de Sebald28. Pour qui ne voit pas le monde des marginaux, le réseau du quinconce se transforme en grille rationalisante.

Grille

Pour observer le sens du réseau en tant que grille, revenons à la situation initiale d’immobilité du protagoniste. Étant donné cet état d’immobilité, les distances parcourues peu de temps auparavant dans le Suffolk semblent désormais impossibles à parcourir, à tel point que le narrateur peine à atteindre l’unique fenêtre de la pièce. Il se retrouve dans un espace si petit qu’il est loin de tout :

Je devins la proie d’une véritable hantise, me figurant que les vastes espaces que j’avais franchis l’été précédent dans le Suffolk s’étaient définitivement rétractés en un seul point aveugle et sourd. Il est vrai que de mon lit je ne voyais du monde qu’un morceau de ciel blafard s’inscrivant dans l’embrasure de la fenêtre29.

La scène décrite est l’emblème d’un état de perte totale et irrémédiable. La perte non seulement de la vie avant l’infirmité, mais aussi du monde entier, qui est contracté et distant, imperceptible aux sens brouillés du protagoniste. L’état de perte n’est pas atténué, mais plutôt confirmé de manière tragique, au moment où le narrateur parvient, en hésitant, à atteindre le bord de la fenêtre et à regarder dehors :

Et de même que Gregor, les yeux devenus troubles, ne reconnaissait plus la silencieuse rue Charlotte, où il vivait depuis des années avec les siens, et la tenait pour un désert grisâtre, de même la ville familière, qui se déployait des aires d’accès à l’hôpital jusqu’à l’horizon, me paraissait totalement étrangère. Je n’arrivais pas à croire que tout en bas, parmi ces murs encastrés les uns dans les autres, quelque chose pût encore bouger30.

Le sentiment mélancolique de perte n’est pas simplement lié à l’état d’immobilité. Lorsque le narrateur sort à peine du lit, rampe jusqu’à la fenêtre et, avec difficulté, s’accroche au rebord, il ne lutte pas pour surmonter son état de perte, mais l’affirme de manière encore plus catégorique. Ce n’est pas la réintégration dans le monde du présent, à l’intérieur de canons sociaux, qui l’intéresse. Penché par la fenêtre, il prend conscience de sa nature mélancolique. Son aveuglement face aux rues animées, aux bâtiments urbains, à la vie économique et sociale de la ville incarne son rejet radical et, en même temps, son impossibilité essentielle à surmonter son état d’infirmité et d’exclusion du monde social. En effet, entre les pages de l’analepse, une digression décrit le même sentiment d’aveuglement face à un monde qui rétrécit. Le protagoniste y raconte une époque où il pouvait encore marcher et voyager et où, en regardant par les fenêtres des avions, il avait l’impression d’être seul au monde :

Que l’on survole Terre-Neuve ou, à la tombée de la nuit, les myriades de lumières qui scintillent entre Boston et Philadelphie, que l’on survole les déserts nacrés d’Arabie, la région de la Ruhr ou celle de Francfort, toujours on dirait qu’il n’y a pas du tout d’hommes, qu’il n’y a que ce qu’ils ont créé et ce dans quoi ils se cachent. On voit leurs habitations et les chemins qui les relient, on voit la fumée qui monte de leurs maisons et de leurs lieux de production, on voit les véhicules dans lesquels ils sont assis, mais les hommes eux-mêmes, on ne les voit pas31.

Même la fenêtre suit la logique du quinconce. Elle initie une sorte de mouvement, déclenche le souvenir du voyage et l’action d’écrire. À partir de la fenêtre, le reste de la réalité, réduite et lointaine, se déploie en se montrant dans son ampleur et sa complexité, dans la particularité de la collection sebaldienne. La fenêtre de Sebald, bien que munie d’une grille symbole de barrière et d’emprisonnement, dévoile le réel. Se plaçant entre la chambre d’hôpital, les yeux du protagoniste et le reste du monde, la grille et la fenêtre sont également le support du sentiment d’exclusion du protagoniste.

À cet égard, nous notons la dénonciation par Sebald de l’arrogance de la fenêtre, de la vue d’en haut, qui s’illusionne sur la compréhension de la dynamique intime du monde. Il s’agit d’une critique de la fenêtre en tant que dispositif destiné à fournir une vision rationnelle du monde32. En donnant une direction précise au regard et en mettant la réalité en perspective, la fenêtre la rationalise, la géométrise et, finalement, la contrôle. Pour cette raison, la cécité du protagoniste qui se penche sur le rebord de la fenêtre est extrêmement lucide. Elle indique l’impossibilité de voir une réalité qui est déjà configurée pour être contrôlée, et non observée. Elle implique le refus de toute vision cartésienne et rationalisante du monde.

Dans un autre passage du livre, le protagoniste rend encore plus explicite sa critique du regard descendant et généralisateur, qui n’observe pas, parce qu’il croit avoir déjà tout vu et tout compris. Le narrateur raconte son précédent voyage en Belgique et sa visite au panorama de la bataille de Waterloo, qui abrite une peinture monumentale de la célèbre bataille. Comme c’est souvent le cas pour les œuvres sur ce thème, la fresque reproduit la scène vue d’en haut. L’image est acceptée comme un document, mais la reconstitution est entièrement fictive, créée par des hommes qui n’étaient pas présents sur le terrain. Il s’agit donc, écrit Sebald, de « l’art de la représentation de l’histoire33 ». L’image elle-même est construite sur une perspective faussée. Les survivants voient les choses de haut, toutes en même temps, et cependant, ne savent pas comment c’était. En écoutant l’audioguide reconstituant le déroulement des combats, le protagoniste se retrouve aveugle face à une réalité déjà dépeinte et rationalisée : « Impossible de faire une image claire. Ni sur le terrain ni le jour de ma visite. » Le protagoniste décide alors de fermer les yeux, rejette la schématisation historique et regarde littéralement la bataille se dérouler, voit ses détails microscopiques : le passé anime de façon spectaculaire la surface de terre brune de Waterloo.

C’est seulement lorsque je fermai les yeux – je me le rappelle parfaitement – que je vis un boulet de canon passer en diagonale à travers une rangée de peupliers, projetant en l’air une pluie verdoyante de rameaux arrachés. Puis je vis encore Fabrice, le jeune héros de Stendhal, errer sur le champ de bataille, pâle, les yeux fiévreux, et aussi un colonel tombé de cheval, se relevant et disant à son maréchal des logis : je ne sens que la vieille blessure à ma main droite34.

La critique de la fenêtre correspond, plus généralement, à la dénonciation par Sebald des médias quand ils sont des dispositifs de contrôle du monde. Examinons brièvement le rôle du dessin et de la peinture dans le texte : la fresque de la bataille de Waterloo est falsificatrice car elle se pose comme une narration fidèle des combats. De même, les illustrations des types de lépidoptères dans un dictionnaire encyclopédique de 1844 sont une opération violente, car elles schématisent leur apparence et leurs habitudes, prédisposant ainsi leur domestication, leur exploitation et finalement leur mise à mort pour la production de la soie.

Au contraire, le tableau du XVIIe siècle intitulé La leçon d’anatomie du Dr Tulp de Rembrandt, est une reconstruction historique délibérément fausse35. L’avant-bras et la main droite prolongent le membre gauche, donnant une forme complètement artificielle au corps examiné. La pratique de l’autopsie est également inexacte, car elle commence par la main, qui est responsable du crime commis par l’homme vivant, et non par l’estomac. C’est la dénonciation par Rembrandt des conséquences déshumanisantes du regard des Lumières. Rembrandt parvient à cette critique en mettant en évidence une déformation de la réalité, soulignant ainsi son rôle de médiateur et la nature médiale de la fresque.

Sebald se donne le même rôle que le peintre néerlandais. Il montre le défaut du média et plus précisément l’incapacité du média à contenir la complexité de la réalité dans un schéma. En plus de la critique de la peinture en perspective, que nous avons observée dans le cas du panorama de la bataille de Waterloo et de la peinture de Rembrandt, le texte de Sebald s’intéresse aux photographies. Si le peintre peut devenir critique des prétentions de représentativité objective de la peinture, les photographies semblent à première vue le symbole insurmontable d’un tel regard objectif. Celles-ci sont insérées directement dans le texte. Elles interrompent souvent les phrases. Elles détournent l’attention et prétendent être observées par le lecteur. Elles sont placées sur le même plan que le support de l’écriture, leur conférant une autorité semblable.

Dans l’une de ses interviews, Sebald lui-même déclare que les photographies sont le document « par excellence » et témoignent d’une authenticité que l’écrit ne peut garantir36. Comme l’a déjà observé J. J. Long, l’autorité référentielle que de tels documents apportent au texte s’inscrit parfaitement dans le désir de certitude documentaire de la modernité. Les photographies sont en effet la preuve tangible que quelque chose a existé à un moment donné dans le passé. Elles semblent donner de l’autorité au texte et en garantir la véracité. Dans le même entretien, Sebald ajoute cependant que, précisément en raison de leur référentialité, « they’re just documents of found objects and are themselves quite secondary37 ». Lorsque les photographies sont pensées en tant que documents, elles n’existent que pour confirmer et appuyer ce qui est déjà exprimé dans le texte. Le caractère documentaire communément attribué à la photographie est pour Sebald la raison de son authenticité présupposée et, en même temps, de sa valeur seconde par rapport au texte. Dans le contexte des Anneaux de Saturne, les photographies perdent précisément cette valeur documentaire. Apparaissant sans légende et sans repères spécifiques pour indiquer le lieu et la période historique de la prise de vue, elles auraient pu être prises n’importe où et à n’importe quel moment38.

Les photographies sont évidemment cohérentes avec les scènes racontées, mais elles sont inexpressives car elles ne renvoient pas à un moment précis. Même comparées à d’autres romans sebaldiens tels que Vertigo ou Les Émigrants, les photographies des Anneaux de Saturne « seem less interestingly, merely illustrative » – écrit, par exemple, Susan Sontag dans son essai sur l’auteur allemand39. Cet anonymat des images dénote un rejet clair de l’autorité et du pouvoir documentaire de la photographie. Dans Les Anneaux de Saturne, cette dernière s’avère incapable d’organiser la connaissance, de restituer la réalité et de correspondre à la transparence documentaire que lui attribue l’Occident de la modernité40. On retrouve la même ambiguïté dans l’image de la fenêtre qui ouvre le livre. La neutralité est totale, la photographie aurait pu être prise n’importe où et à n’importe quel moment. La photographie de Sebald peut donc être comprise comme l’antithèse de la vision de la photographie proposée dans la Chambre claire de Roland Barthes41. Si Barthes est à la recherche de la photographie qui exprime l’essence d’une personne, les images accumulées dans le texte de Sebald sont toutes capables de dire quelque chose sur le monde des marges dont le narrateur dessine la cartographie. Prises individuellement, elles seraient difficiles à rattacher à un moment précis de l’espace et du temps ; elles acquièrent un sens lorsqu’elles sont comprises en relation avec le reste de la narration, c’est-à-dire la subjectivité du narrateur et les perceptions qu’il décrit42. Cette subjectivité raconte le sentiment empathique et la série de connexions qui donnent naissance au réseau de correspondances, de rencontres et de souvenirs du quinconce sebaldien.

Le rejet de la valeur documentaire de la photographie implique la négation de la photographie en tant que dispositif de vision objective. En offrant la « perspective monoculaire » du photographe, la photographie désigne son auteur comme garant de sa véridicité43. Le photographe est en fait la preuve que l’objet photographié a existé à un endroit et à un moment précis, où l’auteur était présent. Sebald nie précisément l’autorité de la figure d’un tel observateur objectif. Il montre le caractère substituable du point de vue objectif de l’auteur de la photo en le remplaçant par celui du narrateur et de son texte. Nous ne pouvons comprendre les photos de Sebald qu’à partir du contexte dans lequel elles sont placées et non à partir de l’histoire individuelle de chaque image.

Comme la photographie, la fenêtre présuppose un point de vue neutre et organise la vue. La fenêtre organise la perspective à partir de laquelle on observe l’extérieur44. De même que la photographie, la fenêtre de Sebald est également un dispositif de vision incapable de remplir sa fonction, car elle ne permet pas de voir ou d’organiser l’extérieur à partir du point d’observation du protagoniste, immobile dans un lit d’hôpital. Elle possède également une grille. C’est un filtre qui s’interpose avec force entre le protagoniste et le reste du monde. Comme le membre gauche peint par Rembrandt, la grille souligne la présence du support et son échec.

En s’explicitant de la sorte, le dispositif peut être examiné, interrogé, et finalement remis en question et dépassé. Par conséquent, la grille acquiert également une signification positive, car elle constitue le support du jugement critique de l’auteur à l’encontre de la partialité des représentations imposées par la modernité45. Ce n’est pas une coïncidence si la structure du treillis est répétée de manière presque obsessionnelle dans tout le texte de Sebald. Les images d’une caille chinoise en cage dans les jardins de Somerleyton46 ; d’un massacre d’anguilles causé par le chalutage47, un type de pêche qui a dépeuplé les mers de Lowesoft ; d’un réseau de câbles de mines de diamants en Afrique du Sud48 ; des bases militaires d’Orford, représentées à la fois sur une carte géographique et sur une photographie49, sans surprise vue d’en haut, ne sont que les exemples les plus évidents d’une tendance qui persiste tout au long du roman. Comme le montrent les exemples cités, la grille raconte dans le roman l’intervention humaine dans les cas de violence ou d’exploitation des ressources naturelles. La grille incarne la critique sebaldienne d’une telle exploitation, qui objective la réalité sans se préoccuper de ses victimes. Quand le narrateur des Anneaux de Saturne interprète la figure du réseau comme une grille, cette dernière apparaît comme un filtre qui pose un regard mathématique et quantifie le réel sans tenir compte des différences. Au contraire, lorsque le protagoniste se concentre sur ce qui le lie aux objets, aux lieux et aux personnes qu’il rencontre lors de son pèlerinage dans le Suffolk, le filtre quantifiant de la grille disparaît. À sa place, apparaît la figure du réseau en tant que quinconce, la série d’affinités et de correspondances qui structurent la narration du roman.

La grille de la fenêtre sebaldienne sépare le protagoniste du monde extérieur : c’est la conscience de l’exclusion sociale et de l’incompatibilité entre la vision du narrateur et celle du reste des sociétés occidentales. En même temps, la fenêtre, en tant qu’explication du jugement critique sur le monde, fait sortir la pensée du narrateur de la chambre d’hôpital, dans une proximité empathique avec tout ce qui existe sous la grille. De cette façon, le réel, rétréci et distant en raison du brouillage des sens, se rapproche de la sensibilité du protagoniste. Les sens émoussés du mélancolique deviennent extrêmement aigus envers ce qui l’intéresse. Quand « les traces de la destruction50 » exigent que le narrateur les contemple dans sa concrétude, le réel devient visible et tangible pour le protagoniste.

Conclusion

L’image du réseau souligne le sentiment de marginalisation et, en même temps, la correspondance et la proximité empathique des victimes de cette exclusion. Le sentiment de perte est pour le protagoniste le seul possible face à l’image du réseau comme grille, qui simplifie et géométrise le monde. L’immobilité et la cécité sont le refus du personnage sebaldien d’accepter le système visuel de contrôle prédisposé par la grille et la fenêtre. L’inefficacité documentaire de la photographie de la fenêtre qui apparaît dans le roman est une autre façon pour Sebald de répudier cette vision objective qui organise rationnellement le champ de vision. En effet, la photographie présuppose un point d’observation neutre, qui détermine l’autorité référentielle de la photographie elle-même. Les images des Anneaux de Saturne, privées de leur objectivité, doivent être comprises à partir du récit subjectif du roman et de la relation que ce récit crée entre elles. Cette dynamique relationnelle est le réseau du quinconque, l’ensemble des connexions qui déterminent l’écosystème du roman de Sebald. À partir de la photographie comme collection, archive, accumulation, nous pouvons tracer la cartographie temporelle et spatiale qui caractérise l’histoire des Anneaux de Saturne. Ici, le pèlerinage remplace l’infirmité, la vision du détail remplace la cécité, l’« affinité élective51 » remplace l’isolement.

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  1. W. G. Sebald, Les anneaux de Saturne, Arles, Actes Sud, 2012.↩︎

  2. Jessica Dubow, « Case Interrupted: Benjamin, Sebald, and the Dialectical Image », Critical Inquiry, Vol. 33 / 4, juin 2007, p. 820‑836.↩︎

  3. Voir par exemple W. G. Sebald, op. cit., p. 57, 80, 125, 300.↩︎

  4. Ibidem, p. 35.↩︎

  5. Nicola Ribatti, « Lo sguardo di Saturno. Critica della modernità e regimi scopici in “Die Ringe des Saturn” di W. G. Sebald », Studia theodisca, Vol. 19, novembre 2012, p. 39‑69.↩︎

  6. Bianca Theisen, « A Natural History of Destruction: WG Sebald’s The Rings of Saturn », Mln, Vol. 121 / 3, 2006, p. 563‑581.↩︎

  7. W. G. Sebald, op. cit., p. 34.↩︎

  8. Ibidem, p. 351.↩︎

  9. Ibidem, p. 237.↩︎

  10. Ibidem, p. 173.↩︎

  11. Ibidem, p. 214.↩︎

  12. Ibidem, p. 173.↩︎

  13. Ibidem, p. 214.↩︎

  14. Christian Scholz, « “But the Written Word is Not a True Document”: A Conversation with W.G. Sebald on Literature and Photography », in Searching for Sebald: Photography After W.G. Sebald, Institute Cultural Inquiry, 2007, p. 108.↩︎

  15. W. G. Sebald, op. cit., p. 33.↩︎

  16. Thomas Browne et Bernard Hoepffner, Le jardin de Cyrus ou Les plantations en quinconce, losange ou réseau des Anciens considérées selon l’art, la nature, la mystique, Paris, CORTI, 2007.↩︎

  17. Op. cit., p. 35.↩︎

  18. Ibidem, p. 18.↩︎

  19. Ibidem, p. 20.↩︎

  20. Ibidem.↩︎

  21. Ibidem, p. 16.↩︎

  22. Friedrich Hölderlin, Hypérion ou l’Ermite de Grèce, Coeuvres, Ressouvenances, 2013.↩︎

  23. W. G. Sebald, op. cit., p. 237.↩︎

  24. Bianca Theisen, op. cit.↩︎

  25. W. G. Sebald, op. cit., p. 13.↩︎

  26. Christina Kraenzle, Lise Patt et Christel Dillbohner, « Searching for Sebald: Photography after WG Sebald », 2007.↩︎

  27. J. J. Long, W. G. SebaldImage, Archive, Modernity, Edinburgh University Press, 2007.↩︎

  28. Nancy Pedri et Isabelle Gadoin, « Mute Images: The Photography of Melancholy in W. G. Sebald’s The Rings of Saturn », Picturing the Language of Images, janvier 2013.↩︎

  29. Op. cit., p. 14.↩︎

  30. Ibidem.↩︎

  31. Ibidem, p. 124.↩︎

  32. Nicola Ribatti, op. cit.↩︎

  33. W. G. Sebald, op. cit., p. 164.↩︎

  34. Ibidem, p. 166.↩︎

  35. Ibidem, p. 28‑29.↩︎

  36. J. J. Long, W. G. SebaldImage, Archive, Modernity, Edinburgh University Press, 2007, p. 48.↩︎

  37. Ibidem.↩︎

  38. Silke Horstkotte, « Visual Memory and Ekphrasis in W. G. Sebald’s The Rings of Saturn », English Language Notes, Vol. 44 / 2, septembre 2006, p. 117‑129.↩︎

  39. Susan Sontag, Where the Stress Falls: Essays, Londre, Jonathan Cape, 2002, p. 47.↩︎

  40. J. J. Long, op. cit., p. 48.↩︎

  41. Roland Barthes, La Chambre Claire, Paris, Seuil, 1980.↩︎

  42. Silke Horstkotte, op. cit.↩︎

  43. J. J. Long, op. cit., p. 48.↩︎

  44. Marion Froger et Éric Méchoulan, « Fenêtre  : un dispositif ? », Communication langages, Vol. 2-3 / nº 208-209, octobre 2021, p. 227‑246.↩︎

  45. On appelle modernité l’ensemble des pratiques sociales et des valeurs culturelles établies en Occident à partir des XVIIIe (Renaissance) et XIXe (Lumières) siècles. Pour une analyse plus approfondie de la pensée sebaldienne sur le sujet, voir J. J. Long, op. cit.↩︎

  46. Op. cit., p. 57.↩︎

  47. Ibidem, p. 80.↩︎

  48. Ibidem, p. 125.↩︎

  49. Ibidem, p. 300.↩︎

  50. Ibidem, p. 237.↩︎

  51. Ibidem.↩︎


Giulia Ferretti est titulaire d’une maîtrise en philosophie à l’Université de Macerata (Italie) et est candidate au doctorat au Département de littératures et de langues du monde de l’Université de Montréal, option Humanités numériques, sous la direction de Marcello Vitali-Rosati. Son projet de recherche porte sur les risques et le potentiel liés à la la normalisation des processus informatiques par le biais de protocoles. Elle s’intéresse à la philosophie française contemporaine, à la philosophie du numérique et à l’approche introduite par les Critical Code Studies, qui applique l’herméneutique critique à l’interprétation du code informatique.

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